En Grèce antique, nouveau climat d’ouverture

Au VI siècle avant Jésus-Christ, en Grèce antique, pour la première fois dans l’histoire, s’installa un climat d’ouverture et de tolérance inconnu jusqu’alors.  Ce nouvel esprit favorisa l’émergence de philosophes. Leur caractéristique principale était de s’interroger sur le monde et établir des théories sur base d’éléments observables. Avant cela, l’explication du monde était formulé par des mythes communément acceptés par tous. A cette époque, en Grèce antique, il n’y avait pas encore de distinction entre la science et la philosophie. Le concept de “science” au sens moderne n’existait pas encore.

Emergence de la philosophie : l’exemple des Stoïciens

Dès le 4ème siècle avant J-C, il existe déjà plusieurs écoles de philosophie en Grèce antique. Plutôt que de s’intéresser à toutes, nous allons nous limiter à une seule pour approfondir le sujet : l’école des Stoïciens. Luc Ferry explique avec beaucoup de clarté les éléments principaux dans son livre “Apprendre à vivre” :

Le père fondateur de l’école stoïcienne, Zénon de Kition (334 -262 av J-C) enseignait sous des arcades recouvertes de peinture. C’est comme cela que le mot “Stoïcisme” est né. Il vient tout simplement du grec ‘stoa’ qui signifie “portique”. Ses leçons étaient gratuites et publiques. Elles eurent un écho si considérable qu’à sa mort, son enseignement fut poursuivi et prolongé par ses disciples.

C’est d’ailleurs grâce à ses disciples que l’enseignement de Zénon a pu être transmis.

Les trois grands axes de la philosophie générale

Dans le livre de Luc Ferry, la philosophie est présentée en trois grands axes :

  1. La théorie : Qu’est-ce qui est ? De quoi est fait le monde qui nous entoure ? Quelle est sa nature véritable? Un sous-ensemble de cette théorie explique quels sont les moyens à disposition pour apprendre à connaître ce monde ?
  2. L’éthique : c’est le domaine qui répond aux questions d’ordre moral, de justice.
  3. La sagesse : Comment se libérer des souffrances liées à la condition humaine ? Comment affronter avec sérénité la mort, la maladie, la souffrance et la séparation des êtres qui nous sont chers ?

Ces trois grands axes appliqué à l’école stoïcienne :

  1. La théorie des Stoïciens : En Grèce antique, les Stoïciens pensent que le monde qui nous entoure est harmonieux, ordonné et animé. Ils l’appellent le “cosmos”. C’est à dire l’univers tout entier. Et c’est une organisation magnifique, juste et bonne. Pour le découvrir et mieux le connaître, il faut utiliser l’observation et le raisonnement logique. D’où, le développement de l’astronomie, de la physique ou de la biologie en Grèce antique.  C’est un point important parce qu’on voit ici que la façon dont l’Homme interprète son environnement a de l’influence sur le fonctionnement concret de la société. De même, dans la page suivante, on montre également le lien entre la pensée et l’organisation pratique de la société.  Ce que les Grecs appellent le “Divin” inclut l’Univers tout entier et nous les humains en faisons partie. Pour percevoir cette beauté, il faut regarder l’ensemble.
  2. L’éthique : une justice qui prend l’ordre cosmique pour modèle.

S’ajuster au cosmos, voilà aux yeux des Stoïciens, le mot d’ordre de toute action juste, le principe même de toute morale et de toute justice.  … C’est la raison pour laquelle, les écoles philosophiques de l’époque insistent moins sur les discours que sur les actes, sur les concepts que sur les exercices de sagesse.

Un oeil vertueux ?

C’est un concept d’éthique très compliqué à comprendre pour nous qui ne sommes pas habitués à ce mode de pensée. Reprenons la façon de pensée des Grecs : “Comme le cosmos est harmonieux et parfait, il s’agit de réaliser ce que la nature a prévu pour nous”. Dans ce sens, quand Aristote parle d’un œil ou d’un cheval “vertueux”, cela veut simplement dire “conforme à ce que la nature a prévu”.

L’être vertueux, c’est celui qui réalise ses dispositions naturelles.

Autrement dit, si vous avez un don naturel, vous devez le mettre en pratique, c’est à dire “l’actualiser”.

  1. La sagesse : nous sommes un fragment du Cosmos. Comme une goutte qui se sépare de l’océan pendant notre vie, nous reviendrons à lui à notre mort. il est donc préférable de ne pas s’attacher à des êtres proches ou à des biens matériels. On comprend de même qu’il n’y a donc pas de vie personnalisée dans l’au-delà comme dans le Christianisme.

Premières réflexions scientifiques

Pythagore de Samos et le monocorde

Pythagore de Samos est de cette époque. A partir de l’an 540 av J-C, il s’intéressait déjà aux nombres. En effet, il voulait trouver des liens entre le monde réel et les nombres entiers. Sa première découverte majeure, il la doit à des expériences sur un instrument de musique appelé monocorde.

La corde étant toujours maintenue sous la même tension. Seule, sa longueur pouvait être modifiée. Le pincement d’une longueur de corde particulière génère une note particulière. Pythagore comprit que la diminution de moitié de la longueur de la corde produit la même note mais une octave plus haut. Plus généralement, il constata que la modification de la longueur d’une corde dans un rapport simple produisait créait une nouvelle note en harmonie avec la première. Exemple : un rapport de 3/2 produit une quinte.” (Le roman du Big Bang, Simon Singh).

C’est un pas de géant parce que à partir d’un fait observable, Pythagore donne une explication qu’on peut vérifier et reproduire. Et avec cela, il crée un lien entre un phénomène auditif et une théorie basée sur des nombres. L’importance de cette découverte est gigantesque.

Grèce antique - Athène - Érechthéion

Grèce antique – Athène – Érechthéion

Elle montre que grâce à de la réflexion et de l’observation, on peut comprendre des événements jusqu’alors inexpliqués et prévoir des comportements futurs. Pour la suite, je vais vous expliquer comment les Grecs ont pu comprendre que la Terre était ronde, calculer son diamètre, calculer le diamètre de la lune, puis les distances Terre-Lune et Terre-soleil.

Eratosthène et le calcul du diamètre de la Terre

En 275 avant J-C nait Eratosthène à Cyrene, dans l’actuelle Lybie.

Dès son enfance, il montra des prodigieuses capacités intellectuelles. Adulte, il dirigea pendant de nombreuses années la bibliothèque d’Alexandrie, probablement la fonction académique la plus prestigieuse de l’Antiquité.

En Grèce antique, on partageait la croyance que la Terre était ronde. Quand les bateaux disparaissaient à l’horizon, le mât disparaissait en dernier. Cela ne pouvait s’expliquer que si la mer était incurvée. Si la mer était incurvée, il y avait fort à parier que la Terre elle-même était ronde.

Le puits de Syène à l’emplacement exceptionnel et l’idée de génie

Eratosthène entendit parler d’un puits aux propriétés remarquables, situé près de Syène, dans le sud de l’Egypte. Chaque année, le 21 juin à midi, le jour du solstice d’été, le Soleil éclairait directement le fond du puits. Eratosthène comprit qu’en ce jour, le Soleil devait se trouver directement à la verticale du lieu d’observation. Alors que cela n’arrive jamais à Alexandrie, située à plusieurs centaines de kilomètres au nord de Syène. Eratosthène était conscient du fait de la courbure de la Terre, le Soleil ne pouvait apparaître en même temps à la verticale à Syène et à Alexandrie. Dès lors, il se demanda s’il ne pouvait pas exploiter cette observation pour mesurer la circonférence de la Terre. 

Concrètement

Eratosthène - Diamètre de la Terre

Eratosthène – Diamètre de la Terre

La figure ci-dessus montre comment les rayons du Soleil frappent la terre à midi le 21 juin. Au même moment, les rayons du Soleil éclairaient le fond du puits de Syène. Pour cette raison, Eratosthène planta un piquet à Alexandrie. Ensuite, il mesura l’angle entre les rayons du Soleil et le piquet car cet angle équivaut à l’angle reliant respectivement Alexandrie et Syène au centre de la Terre. Comme on peut le voir sur la figure, cet angle valait 7.2°. Sachant que tout le tour de la Terre vaut un angle de 360°, la distance Syène – Alexandrie valait un angle de 7.2° : 7.2/360 = 1/50. Donc, la distance Syène – Alexandrie valait 1/50 de la circonférence de la Terre.

Ainsi, Eratosthène calcula une circonférence de la Terre de 250 000 stades, ce qui valait 46 250 km. Et s’il n’avait pas confondu le stade olympique et le stade égyptien, il aurait obtenu une valeur de 39 250 km, soit une marge d’erreur de 2% seulement. Peu importe la marge d’erreur, ce qui compte, c’est que Eratosthène (vous allez retenir son nom 😉  )  ait élaboré un mode de calcul scientifique des dimensions de la Terre. Avant lui, personne ne savait si la Terre avait une circonférence de 4 000 km ou de 4 000 000 km. 

Si vous n’avez pas bien compris, alors je vous propose de regarder la vidéo ci-dessous:

Calcul du diamètre de la Lune

Grâce au périmètre de la Terre, calculer le diamètre de la Lune devient facile avec un peu d’ingéniosité.

40 000 km de périmètre pour la Terre donne un diamètre de 40 000 km / pi = 12 700 km. Pour rappel, on divise le diamètre par la valeur ‘pi’. Ensuite, pour calculer le diamètre de la lune, on a besoin d’une éclipse lunaire. Grâce à l’éclipse, on peut observer le passage de la Lune à travers l’ombre de la Terre. Comme la Terre et la Lune sont très éloignées du Soleil, la largeur de l’ombre de la Terre est approximativement égale au diamètre de notre planète.

Dans une éclipse lunaire, pour que la Lune soit entièrement recouverte par l’ombre de la Terre, cela prend 50 minutes. Ensuite, on ne voit pas la Lune pendant 150 minutes. Ce qui veut dire qu’on peut mettre 4 fois la largeur de la Lune dans l’ombre de la Terre. Dès lors, on en déduit que le diamètre de la Lune est quatre fois plus petit que celui de la Terre. Le diamètre de la Lune est d’environ 3200 km.

(Le roman du Big Bang, Simon Singh).

 

Vous avez bien mérité ce petit morceau de musique de la Grèce antique :